ABS-CBN
Aux Philippines, le président Duterte fait fermer la principale chaîne de télévision du pays
ABS-CBN, régulièrement ciblée par le dirigeant populiste, a cessé d’émettre mardi. Sa licence n’a pas été renouvelée.

« ABS-CBN, au service des Philippins. On rend l’antenne. » C’est ainsi que la chaîne de télévision la plus regardée de l’archipel aux mains de Rodrigo Duterte a cessé d’émettre, mardi 5 mai au soir, sous les coups de boutoir d’un président ne dissimulant pas son hostilité envers les médias qui osent le critiquer. La Commission des télécommunications, organe gouvernemental, a ordonné la suspension de la diffusion au lendemain de la date d’échéance de la licence du groupe de médias, qui n’a pour l’heure pas été renouvelée par un Parlement majoritairement acquis au chef de l’Etat.
La suspension survient alors que les Philippines font face à la propagation du Covid-19, qui a contaminé 9 684 habitants de l’archipel et causé la mort de 637 d’entre eux. Le président a ordonné à la police d’abattre ceux qui se montreraient réfractaires au confinement décrété sur l’île principale, Luzon. L’opposition dénonce un calendrier particulièrement nocif pour s’en prendre au premier vecteur d’information des Philippins. « La délivrance d’une information précise et dans les meilleurs délais est essentielle dans notre lutte contre le Covid-19 », a lancé mardi la sénatrice Risa Hontiveros.
Quatre ans après l’élection à la présidence philippine du dirigeant populiste, le climat s’est nettement détérioré dans les médias philippins. Surtout ceux qui ont couvert en profondeur sa sanglante guerre contre la drogue, qui selon la Commission des droits de l’homme du pays pourrait avoir fait plus de 27 000 victimes lors d’exécutions extrajudiciaires (plus de 5 500 selon la police).
L’administration Duterte a déjà lancé de multiples procès contre Maria Ressa, la rédactrice en chef du site d’information Rappler, qui a contribué à révéler le fonctionnement de cette meurtrière campagne d’exécutions sommaires : comment les policiers sont devenus des tueurs à gage abattant les jeunes des bidonvilles qui oubliaient leurs malheurs dans la fumée de méthamphétamine.
(Le Monde)