Point de vue: « La renaissance de l’ONU est la seule solution au chaos du monde »

Publié le

Lu sur l’Humanité Dimanche:

Vice-président du comité consultatif du Conseil des droits de l’homme des Nations unies, Jean Ziegler déplore la paralysie actuelle de l’ONU. Incapable d’assurer la sécurité collective, elle doit être réformée rapidement. Le chaos de notre monde actuel l’impose. Son espoir ? Le réveil de la société civile « porteuse d’une formidable espérance ».

L’Humanité Dimanche. Ukraine, Gaza, Irak, Syrie : les Nations unies et, plus précisément, le Conseil de sécurité chargé d’empêcher les conflits semblent « malades »…

Jean Ziegler, Professeur honoraire de sociologie de l’université de Genève,
Jean Ziegler, Professeur honoraire de sociologie de l’université de Genève

Jean Ziegler. C’est évident que les Nations unies sont paralysées et ne font pas ce pourquoi elles ont été fondées en juin 1945 : assurer la sécurité collective. Dans la charte de l’ONU, il y a le chapitre VII, qui est central et qui définit un ensemble de moyens à mettre en œuvre en cas de conflit. Cela va de l’embargo économique à l’envoi de troupes contre l’agresseur. Ce chapitre VII, c’est-à-dire l’ensemble des instruments à disposition pour assurer la paix, terminer un conflit et punir un agresseur, ne fonctionne pas et c’est lamentable. La faute au Conseil de sécurité et au droit de veto. Soyons clairs, lorsque l’ONU a été créée, ce droit de veto était nécessaire. À l’Assemblée générale, chacun des 194 États membres dispose d’une voix, quelle que soit sa population ou son poids économique : c’est la démocratie totale. Le plus petit État, le Vanuatu, 55 000 habitants, le plus grand, la Chine, 1,4 milliard d’habitants, chacun a une voix. Mais à la sortie de la Seconde Guerre mondiale, les Alliés (États-Unis, France, Royaume-Uni, URSS et Chine) n’ont pas fait entièrement confiance à ce principe démocratique, se rappelant que c’était par les urnes qu’Hitler avait accédé au pouvoir. Aussi ce droit de veto était-il justifié afin de se prémunir d’éventuelles décisions qui auraient pu être prises démocratiquement par l’Assemblée générale mais qui auraient été désastreuses pour la paix du monde. Aujourd’hui, ce droit de veto est totalement paralysant. Les cinq membres permanents qui en disposent suivent leurs propres raisons d’État. Vous prenez n’importe lequel des conflits actuels, Gaza, Syrie ou Ukraine, à chaque fois vous avez un pays qui utilise son droit de veto pour bloquer l’intervention de l’ONU.

HD. Que faire alors ?
J. Z. Tout le monde est conscient, en tout cas nous au Conseil des droits de l’homme, que ce droit de veto ne peut plus durer. Il faut qu’il disparaisse et que le système de sièges permanents évolue. Le plan de réforme, qui est sur la table et qui n’avance pas depuis huit ans, est celui de Kofi Annan. Il propose que les sièges permanents soient « tournants ». Exemple : les sièges permanents de la France et de la Grande-Bretagne seraient supprimés et l’on créerait un siège permanent pour l’Europe occidentale qui serait occupé successivement par les principaux États d’Europe occidentale. Même chose pour la zone Asie, le siège permanent de la Chine serait confié par rotation au Japon, à l’Inde, au Pakistan, etc. Idem pour l’Europe de l’Est, les Amériques, etc. Et évidemment, plus de droit de veto.

(… Cliquer pour lire l’intégralité de l’interview)

Laisser un commentaire