Tournée de Kamala Harris en Asie : Washington en quête de soutien dans l’Indo-Pacifique

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Derrière les enjeux en mer de Chine du Sud, la défense de Taïwan motive le renforcement des forces américaines en Asie du Sud-Est, notamment aux Philippines.

La vice-présidente américaine Kamala Harris sur le navire des garde-côtes philippins « Teresa Magbanua » à Puerto Princesa, le 22 novembre 2022. La vice-présidente américaine Kamala Harris sur le navire des garde-côtes philippins « Teresa Magbanua » à Puerto Princesa, le 22 novembre 2022.

Si l’engagement américain en Asie du Sud-Est avait besoin d’une image symbolique, celle de Kamala Harris, la vice-présidente américaine, sur un navire des gardes-côtes philippins, à Puerto Princesa, sur l’île de Palawan, mardi 22 novembre, ferait certainement l’affaire : dans un long discours, Mme Harris y a réaffirmé le soutien des Etats-Unis à leur allié philippin « face à l’intimidation et à la coercition » auxquelles font face ses pêcheurs et ses marins en mer de Chine du Sud. « Nous soutenons la décision de 2016 du tribunal arbitral de l’ONU (…),  unanime et définitive, rejetant fermement les revendications maritimes de la Chine en mer de Chine méridionale pour [y asseoir] son expansion », a précisé la vice-présidente. Saisie par les Philippines, la décision de la Cour permanente d’arbitrage (CPA) de La Haye avait mouché, en 2016, les prétentions chinoises sur cette mer intérieure entre l’Asie du Sud-Est, le sud de la Chine et Taïwan. Pékin ne l’a jamais reconnue, et les accrochages entre navires chinois et philippins dans la zone économique exclusive des Philippines n’ont pas cessé.

Or, l’île philippine de Palawan, longue de 450 kilomètres, fait face à l’archipel des Spratleys, revendiqué par tous les pays riverains, mais où la Chine a, depuis 2013, transformé sept récifs et atolls en base navale ou aérienne. Palawan est donc, pour Washington, l’une des lignes de front de l’Indo-Pacifique, cette vaste région entre Inde, Australie et Japon, où les Américains sont déterminés à faire respecter les « normes et les règles d’une navigation libre et ouverte ».

Un incident, survenu quelques heures avant l’arrivée de Kamala Harris à Manille, l’a rappelé, lundi : des marins philippins remorquant, à proximité de l’île Thitu occupée par la marine philippine, des débris à la dérive ont été bloqués par un navire des gardes-côtes chinois. Celui-ci a envoyé un commando en vue de sectionner le câble et de récupérer l’objet, identifié comme provenant d’une fusée chinoise. Les Philippines ont protesté. La Chine, elle, a immédiatement donné sa version de l’incident : « Après des négociations amicales, la partie philippine a sur-le-champ rendu l’objet flottant à la partie chinoise, qui lui a exprimé sa gratitude », a déclaré à Pékin Mao Ning, la porte-parole du ministère des affaires étrangères chinois.

Traité de défense mutuelle

La visite de Mme Harris aux Philippines fait suite à une succession de rencontres à haut niveau entre Américains et Philippins depuis l’élection de Ferdinand Marcos Jr, en mai. Celui qui est surnommé « Bongbong » a rencontré Joe Biden à deux reprises en tête à tête ; le secrétaire d’Etat américain, Antony Blinken, s’est rendu à Manille en août, et les ministres de la défense des deux pays ont tenu à Hawaï, en septembre, un sommet pour y discuter « l’éventail complet de [leurs] préoccupations en matière de sécurité ». Manille et Washington sont liés par un traité de défense mutuelle, datant de 1951. Après le retrait des bases américaines du pays, en 1992, d’autres formules ont permis, à partir de 1999, des rotations de troupes américaines dans les bases philippines existantes. Puis l’Accord de coopération renforcée en matière de défense (EDCA) de 2014, en plein « pivot » américain vers l’Asie sous la présidence de Barack Obama, a entériné l’usage « non permanent », par les forces armées américaines et « conjointement avec l’armée philippine », de cinq bases largement modernisées. Dans les faits, les « bottes » américaines foulent de nouveau le sol philippin.

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