Les Russes ayant refusé de participer à la guerre en Ukraine peuvent obtenir le statut de réfugié en France

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La Cour nationale du droit d’asile a précisé, jeudi, sa jurisprudence sur les déserteurs et insoumis russes et rappelle que le demandeur doit « fournir les éléments permettant d’établir qu’il est effectivement appelé à servir dans les forces armées ».

La Cour nationale du droit d’asile, à Montreuil (Seine-Saint-Denis), en 2014. STEPHANE DE SAKUTIN / AFP

La Cour nationale du droit d’asile (CDNA) a rejeté la demande de protection d’un Tchétchène, dans une décision rendue publique jeudi 20 juillet. Le jeune homme de 27 ans disait craindre d’être enrôlé de force pour faire la guerre contre l’Ukraine en cas de retour dans son pays. La cour n’a pas cru à son récit ni aux risques qu’il invoquait. Mais elle a profité du cas du requérant pour affiner et pour unifier sa jurisprudence à propos des Russes déserteurs ou insoumis – ceux qui veulent échapper à la mobilisation.

« Les chambres de la Cour ont jusque-là rendu des décisions divergentes, explique Sylvain Saligari, avocat en droit des étrangers et conseil du requérant. Des demandes de protection étaient rejetées sous prétexte que le demandeur n’avait pas été convaincant sur son objection de conscience. Ou parce que les juges avaient une vision restrictive de la réserve militaire. Ça ne devrait plus avoir lieu. » Plusieurs refus de protection consultés par Le Monde montrent que certains juges considéraient, par exemple, qu’un Russe n’ayant pas fait son service militaire ou n’ayant pas de spécialité militaire n’était pas mobilisable. D’autres décisions de refus reprochaient aux requérants de ne pas suffisamment développer « l’existence de convictions profondes » contre la guerre en Ukraine.

La CNDA estime désormais que les Russes ayant refusé de participer à la guerre en Ukraine peuvent obtenir le statut de réfugié dans la mesure où rejoindre l’armée les rendrait susceptibles de commettre des crimes de guerre. Elle rappelle ainsi dans sa décision – rendue à l’occasion d’une grande formation composée de neuf juges – que l’armée russe a notamment perpétué des attaques généralisées de civils, des viols ou la déportation illégale d’enfants ukrainiens.

La Cour considère ensuite que la mobilisation décrétée par le président russe, Vladimir Poutine, le 21 septembre 2022, peut concerner une large partie de la population. En effet, la réserve militaire comprend tous les citoyens masculins de 18 à 50 ans (pour les soldats) à l’exception des invalides. En outre, « les réservistes mobilisés n’ont pas accès à un service civil de remplacement » et les réfractaires encourent des peines de prison et d’autres sanctions informelles. Du reste, si les juges considèrent que l’ampleur de la mobilisation est « difficile à évaluer » et l’objectif annoncé par les autorités russes de 300 000 réservistes sujet à caution, il est certain que « des milliers de nouvelles recrues ont été envoyées sur la ligne de front presque immédiatement après avoir reçu leur ordre de mobilisation, sans passer par une commission médicale et quasiment sans entraînement ni équipement, pour aller combattre ».

(source: lemonde.fr)

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