Congrès LR : Avec son plébiscite, Retailleau donne de l’air au gouvernement et prend une option sur 2027
Avec 75 % des suffrages au terme de cette course interne, Bruno Retailleau inflige une sévère défaite à Laurent Wauquiez. Quelles conséquences pour les mois à venir ?

POLITIQUE – Le nouvel homme fort de la droite. Bruno Retailleau devient président des Républicains ce dimanche 18 mai grâce au plébiscite des adhérents du parti. Avec 75 % des suffrages (sur quelque 100 000 votants), le ministre de l’Intérieur écrase son concurrent Laurent Wauquiez (25 %), au terme d’une campagne de plus de trois mois très à droite.
Si la victoire du Vendéen, 64 ans, était relativement attendue au regard de son irruption dans le débat politique et médiatique depuis sa nomination au gouvernement, et de sa popularité dans l’opinion, le score qu’il réalise est sans appel. « C’est un peu dur ce soir quand on a soutenu Laurent Wauquiez », a convenu Vincent Jeanbrun, un des soutiens du chef des députés LR, sur BFMTV, quelques minutes après l’annonce des résultats.
Laurent Wauquiez désavoué, Bruno Retailleau ressort donc de ce scrutin interne particulièrement renforcé. Avec des conséquences en cascade : le gouvernement peut profiter d’une bouffée d’air, peut-être fugace, tandis que le ministre devient un prétendant incontournable dans son camp pour la présidentielle 2027.
LR au gouvernement ? Débat « tranché »
De fait, en se prononçant aussi massivement pour le locataire de la Place Beauvau, les adhérents du parti de droite se montrent favorables à sa stratégie politique, donc à la participation des Républicains au gouvernement, même si leurs ministres n’ont pas les mains sur le guidon de Matignon. Cette question « est tranchée », a insisté le ministre au 20 heures de TF1, à l’unisson de tous les cadres de son parti.
« Les adhérents ont validé cette ligne », reconnaissait aussi Vincent Jeanbrun, alors que Laurent Wauquiez a fait de cette question et de la crainte d’une « dilution » dans le macronisme, un argument phare de campagne. Il a même promis un « débat »
au sein de son parti sur ce sujet, et multiplié les points de pression sur François Bayrou et son attelage. À tel point que les ministres, mêmes macronistes, préféraient plutôt la victoire du Vendéen sur l’Altiligérien.
Le spectre d’une explosion du gouvernement s’éloigne donc quelque peu, ce dimanche soir. Le Premier ministre semble d’ailleurs ne pas s’y tromper avec un message particulièrement satisfait à l’annonce des résultats, saluant une « magnifique victoire ». Rien de moins. « Les Français engagés souhaitent, je le crois, que nous fassions cause commune pour sortir, autant que possible, notre pays des difficultés qu’il traverse », a-t-il immédiatement réagi sur les réseaux sociaux. Un peu trop vite ?
Cette bouffée d’air peut effectivement être très fugace pour le centriste et son gouvernement. Fort de ce plébiscite, et de sa cote de popularité grandissante, Bruno Retailleau va pouvoir s’appuyer sur une légitimité accrue au sein de l’attelage – auquel il souhaite encore participer, malgré son nouveau costume. Pour peser sur les arbitrages, faire entendre sa voix, et incliner la politique du gouvernement.
En route vers 2027 ?
« Si je suis élu, le président de LR renforcera le ministre. Et inversement, le fait d’avoir cette visibilité permettra de donner de la force à LR », résumait ainsi le premier concerné, avant le résultat du scrutin. Gageons qu’avec un tel score, François Bayrou (qui s’englue, lui, dans des records d’impopularité) risque rapidement d’éprouver la nouvelle « force » de son ministre de l’Intérieur.
Mais il n’est pas le seul. Du côté des Républicains, aussi, les différentes têtes d’affiche (ceux qui envisagent une candidature en 2027) peuvent regarder le score du nouveau chef avec une forme d’inquiétude. Pour cause, ce succès sans contestation permettra à Bruno Retailleau de se renforcer comme candidat de la droite à la prochaine présidentielle, lui qui a pris soin de ménager ses ambitions dans la presse tout au long de cette course interne. « Colline après colline », a-t-il répété à l’envi pendant la campagne.
D’autant que le ministre de l’Intérieur s’est déclaré favorable à ce que les adhérents des Républicains, seuls, désignent le futur candidat, soit, peu ou prou, le même collège électoral qui l’a choisi ce dimanche. Mais c’est là que les ennuis commenceront. Car cette idée n’est pas partagée par tous les soutiens du ministre, qui n’ont pas attendu les résultats pour mettre la pression, à l’image du président centriste de Normandie Hervé Morin, porte-parole du mouvement Nouvelle Énergie, présidé par David Lisnard. Eux plaident pour une primaire ouverte de Renaissance à LR.
Plus globalement, le Vendéen va devoir composer avec les différentes ambitions au sein de son camp, de Laurent Wauquiez à Xavier Bertrand. Certes, il a pris une option certaine. Mais ses potentiels concurrents ne sont pas prêts à désarmer deux ans avant la présidentielle. Ce dimanche soir, les messages de félicitations se bornent à la « reconstruction du parti »… Loin, encore du candidat naturel pour l’Élysée. Colline après colline, donc.
(source: huffingtonpost.fr)