Danube

Les ports du Danube, fragile alternative aux terminaux céréaliers de la mer Noire

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Les ports aménagés le long du fleuve permettent d’écouler une partie de la production de céréales

Deux navires entrent dans le canal de Sulina, l’un des points de déversement du Danube vers la mer Noire, à Sulina, dans le sud-est de la Roumanie, le 8 juin 2022. DANIEL MIHAILESCU / AFP

Le refus par Moscou de prolonger l’initiative céréalière de la mer Noire n’est pas une surprise pour les Ukrainiens, habitués au chantage que font peser les Russes sur cet accord depuis son lancement il y a un an. Dans le Boudjak, la partie ukrainienne de la Bessarabie, dans le sud-ouest de l’Ukraine, une région enclavée entre la Moldavie, la Roumanie et la mer Noire, on s’est habitué depuis le début de la guerre en février 2022 à voir défiler des dizaines de milliers de camions chargés de maïs, de blé ou d’huile de tournesol.

Izmaïl, petite ville portuaire sur les bords de Danube, est ainsi devenue au fil des mois une plate-forme d’exportation comme solution aux grands ports de la mer Noire. Les cargaisons de céréales, arrivées par camions, y sont chargées sur des barges qui descendent le fleuve jusqu’au port roumain de Constanta, où elles sont ensuite transbordées sur un gros navire.

« Avant, Izmaïl était connu pour être un cul-de-sac, raconte une vendeuse de fromages du marché couvert de la ville. Maintenant, tout ce business des céréales nous a ouverts sur le monde. » Projetées au cœur du conflit russo-ukrainien, les marchandes de fromages bulgares ou moldaves ont développé leur propre thermomètre géopolitique. « Les routes d’Izmaïl sont défoncées par le va-et-vient incessant des camions qui rejoignent les terminaux céréaliers de la ville, s’inquiète l’une d’elles. S’il y a tant de camions ici, ça veut dire qu’il n’y a pas d’autres moyens d’exporter le blé. Et ça, ce n’est pas bon signe. »

Même s’ils espèrent à terme une réouverture complète des ports de la mer Noire par où transitaient avant-guerre la plupart des céréales ukrainiennes, de plus en plus de producteurs et de négociants se tournent vers les petits ports du Danube, le long de la frontière roumaine. Une partie de la récolte peut s’écouler par cette filière, sans subir les aléas des contrôles russes auxquels étaient soumis les navires dans le cadre de l’accord céréalier.

Tentative de ne pas se laisser anéantir

L’un des premiers à saisir l’intérêt de cette voie fluviale a été Oleksiy Vadatoursky, fondateur du principal groupe céréalier ukrainien, Nibulon, basé à Mykolaïv, par où étaient exportées 30 % des céréales ukrainiennes. Dès mai 2022, alors que la ville était sous le feu russe et son terminal céréalier bloqué, il s’était rendu à Izmaïl pour lancer la construction d’un terminal alternatif. Rien qui puisse compenser les énormes capacités des ports de la mer Noire, mais une tentative de ne pas se laisser anéantir par la machine russe qui mène sa guerre aussi sur le front économique.

(source: lemonde.fr)