Bangladesh : Muhammad Yunus, le « banquier des pauvres » devenu premier ministre
Le professeur d’économie, fondateur de la Grameen Bank et Prix Nobel de la paix 2006, a prêté serment, jeudi 8 août, en tant que chef du gouvernement intérimaire. A 84 ans, celui qui se disait « mal à l’aise avec la politique » va devoir apaiser un pays déchiré.
Pour prendre la mesure de la saisissante destinée du « banquier des pauvres », Muhammad Yunus, ce Prix Nobel de la paix 2006 qu’une révolution populaire et sanglante vient de propulser à la tête du Bangladesh – il a prêté serment, jeudi 8 août, en tant que chef du gouvernement intérimaire –, il faut remonter au milieu des années 1970. A l’époque, ce professeur d’économie de l’université de Chittagong, le grand port du sud bangladais, eut une drôle d’idée dans cette nation où pauvreté et surpopulation sont souvent considérées comme inéluctables : « Je me suis dit qu’il fallait changer la vie des pauvres ! », se remémorait-il en 1987, sourire aux lèvres, nous recevant dans son bureau de la capitale, Dacca.
« En revenant chez moi après plusieurs années passées aux Etats-Unis, continuait-il, j’ai compris que le gouvernement était incapable de subvenir aux besoins des plus pauvres. Et je me suis fait la réflexion suivante : après tout, pourquoi ces pauvres ne pourraient-ils pas contribuer eux-mêmes à améliorer leur sort ? »
Cette idée, il l’avait eue après la terrible famine qui avait décimé son pays en 1974, une tragédie qui avait fait, au bas mot, des centaines de milliers de morts. Cette famine, évidemment, n’avait fait que plonger un peu plus dans la détresse cette ancestrale terre de misère et de fertilité, irriguée par le Gange et le Brahmapoutre mais régulièrement endeuillée et appauvrie par cyclones et inondations.
Poursuivant son idée, Muhammad Yunus créa en 1983 la Grameen Bank – la « banque des villages », en bengali –, une institution qui prêterait de l’argent aux plus démunis. L’essentiel, selon Yunus, était d’apporter le capital nécessaire à tout individu désireux de créer son entreprise, un projet devant permettre aux bénéficiaires de s’extirper de la pauvreté.
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