Asie du Sud-Est
En déplacement à Hanoï, Emmanuel Macron appelle à préserver un ordre mondial «fondé sur le droit»
Arrivé dimanche soir dans la capitale vietnamienne, Emmanuel Macron continuera sa tournée jusqu’à vendredi, en Indonésie puis à Singapour.
Dans un contexte mondial de «grands déséquilibres», le président de la République Emmanuel Macron a appelé à «préserver un ordre fondé sur le droit», lundi au Vietnam, première étape de sa tournée en Asie du Sud-Est. «Dans un moment à la fois de grands déséquilibres et de retour de discours de puissances ou d’intimidations», l’ordre international «impose que nous agissions ensemble pour préserver un ordre fondé sur le droit, condition sine qua non à toute prospérité», a rappelé le dirigeant, au cours d’une déclaration à la presse aux côtés de son homologue vietnamien Luong Cuong, à Hanoï.
Le dirigeant a présenté la France comme une alternative fiable au Vietnam, pris en tenaille entre Washington, qui menace d’imposer une surtaxe prohibitive sur ses exportations à destination du marché américain, et Pékin, son allié de longue date avec lequel Hanoï partage des différends territoriaux en mer de Chine méridionale. Ces enjeux accompagneront Emmanuel Macron tout au long de sa visite en Asie du Sud-Est, avec des arrêts prévus en Indonésie et à Singapour cette semaine. Arrivé dimanche soir à Hanoï avec son épouse Brigitte Macron, le président a insisté sur la vision commune partagée avec le Vietnam, pays de cent millions d’habitants à la croissance dynamique, qui partage un passé colonial souvent douloureux avec Paris.
Quelque treize accords ont été signés lundi, notamment sur l’énergie nucléaire, un secteur crucial pour le pays asiatique, dépendant des énergies fossiles, qui cherchent à répondre aux besoins croissants de sa population, ainsi que dans les transports et les satellites. La compagnie low-cost Vietjet Air a aussi annoncé passer commande pour 20 avions gros-porteurs Airbus A330-900, qui s’ajoutent à un premier contrat similaire de 20 aéronefs passé l’an dernier avec le géant européen de l’aéronautique. «C’est bien une nouvelle page qui s’écrit entre nos deux pays (…) Une volonté d’écrire une page encore plus ambitieuse de la relation entre le Vietnam et la France, entre l’Asean et l’Union européenne», a insisté Emmanuel Macron.
Nouvelle commande d’Airbus
Après un hommage dans la matinée à la mémoire des combattants de la guerre d’Indochine qui se sont battus de 1946 à 1954 contre la France, pour l’indépendance, Emmanuel Macron a rencontré son homologue vietnamien Luong Cuong. Le chef de l’État, dont c’est la première visite au Vietnam, doit être reçu plus tard par le secrétaire général du Parti communiste To Lam, qu’il avait lui-même accueilli à Paris en octobre. Le chef du parti, avec lequel il déjeunera au temple de la Littérature, monument dédié à Confucius et lieu emblématique de la culture vietnamienne, est considéré comme le dirigeant le plus puissant du pays, où les organisations de défense des droits dénoncent une répression accrue de toute voix critique du pouvoir.
La semaine dernière, l’ONG Human Rights Watch a exhorté Emmanuel Macron dans une lettre à «faire pression» publiquement sur le gouvernement vietnamien pour qu’il «libère sans condition toutes les personnes détenues pour avoir exercé leurs droits à la liberté d’expression, d’association, de religion et de réunion». Une telle interpellation n’est pas dans les usages du président français qui assure régulièrement préférer évoquer ces sujets sensibles à huis clos. D’autant qu’au Vietnam, l’Élysée espère «renforcer les coopérations dans les secteurs stratégiques tels que l’énergie, les transports et la défense».
Et le chef de l’État entend marteler son offre de «troisième voie» à ce pays d’Asie-Pacifique particulièrement exposé à la concurrence sino-américaine. «Le Vietnam est vraiment sur la première ligne de toutes les tensions qui croissent en mer de Chine méridionale», où Pékin se fait de plus en plus offensif dans ses revendications territoriales, glisse un haut responsable de la diplomatie française. Mais il est aussi en pleines négociations pour tenter d’échapper à la forte taxe douanière de 46% imposée puis suspendue par Donald Trump, alors que les États-Unis sont le plus grand marché des exportations de l’industrie manufacturière vietnamienne.
Des «règles» plutôt que la «jungle»
Énoncée dès 2018, déjà vantée dans de multiples déplacements en Inde, dans l’océan Pacifique ou dans l’océan Indien, la «stratégie indo-pacifique» d’Emmanuel Macron consiste à proposer une troisième voie aux pays de la région. Et elle trouve selon Paris toute sa pertinence depuis le retour de Donald Trump à la Maison Blanche avec ses menaces de guerre commerciale.
De manière plus ou moins subliminale, le président français devrait avoir un message pour chacun. Pour le président américain, en défendant les «règles du commerce international» plutôt que la loi de la «jungle», selon un de ses conseillers. Pour son homologue chinois Xi Jinping, qu’il a appelé avant son départ à garantir une «concurrence équitable», en martelant que la France est un partenaire «respectueux» de «la souveraineté» des pays de la région. Et aussi pour le président russe Vladimir Poutine, en affirmant aux pays comme le Vietnam ou l’Indonésie, longtemps tournés vers Moscou notamment pour leurs armements, mais qui cherchent à diversifier leurs fournisseurs, que la Russie, par la guerre qu’elle mène en Ukraine avec le soutien de soldats nord-coréens, «déstabilise l’Asie» et non seulement l’Europe.
Au Vietnam, cette posture de «puissance d’équilibre» peut trouver un écho: le pays veille lui-même à garder un certain équilibre dans ses relations avec la Chine et les États-Unis, afin de maximiser ses intérêts commerciaux, dans la lignée de sa «diplomatie du bambou».
(source: lefigaro.fr)
L’Indonésie achète 42 avions de combat Rafale à la France
Djakarta, qui a signé jeudi un contrat pour les six premiers avions de combat français, cherche à diversifier ses alliances face à une hausse des tensions en Asie-Pacifique.

Des négociations étaient en cours depuis plusieurs mois entre Paris et le plus grand pays d’Asie du Sud-Est, qui n’avait jamais acquis précédemment d’avions de combat français.
Le ministre de la défense indonésien, Prabowo Subianto, a annoncé, jeudi 10 février, la signature d’un contrat pour six Rafale dans une commande totale d’une quarantaine d’appareils. « Nous nous sommes mis d’accord pour l’achat de quarante-deux Rafale », avec « un contrat signé [jeudi] pour les six premiers », a-t-il fait savoir après une rencontre avec son homologue française Florence Parly, à Djakarta.
L’Indonésie cherche à diversifier ses alliances et ses fournisseurs d’équipement militaire face à une hausse des tensions en Asie-Pacifique entre la Chine et les Etats-Unis. La France cherche, de son côté, à resserrer les liens avec l’Indonésie après avoir vu sa stratégie pour s’affirmer dans l’Asie-Pacifique ébranlée l’an dernier par la rupture soudaine par l’Australie d’un gigantesque contrat d’achat de sous-marins français et de l’annonce de l’alliance stratégique Aukus (pour « Australie, Etats-Unis et Royaume-Uni »).
« Le choix que fait l’Indonésie est celui de la souveraineté et de l’excellence technique, avec un avion qui a démontré ses capacités opérationnelles à de nombreuses reprises », a souligné la ministre des armées, Florence Parly, aux journalistes. L’Indonésie a également engagé une coopération avec la France dans le domaine des sous-marins, a-t-elle précisé.
Un équipement vieillissant
L’Indonésie dispose d’un équipement vieillissant, essentiellement des F-16 américains et des Sukhoï russes Su-27 et Su-30, et est en négociations avec de multiples partenaires afin de renouveler ses avions de combat. D’autant plus qu’un contrat que l’Indonésie avait signé en 2018 pour l’achat de onze avions de chasse Sukhoï Su-35 à la Russie ne s’est jamais matérialisé, du fait d’une loi américaine qui prévoit des sanctions automatiques dès lors qu’un pays conclut une « transaction significative » avec le secteur de l’armement russe.
Les ministres de la défense français et indonésien avaient signé un accord de coopération de défense en 2021 à Paris et des négociations sur l’acquisition de Rafale étaient en cours depuis plusieurs mois sur le financement et des compensations. Djakarta négocie en parallèle l’achat d’une trentaine d’avions de combat américains F-15, selon les médias, et participe à un projet de recherche et développement avec la Corée du Sud pour l’avion de combat KF-21.
Dassault a connu une année faste en 2021 avec, dix-huit appareils vendus à la Grèce (dont douze d’occasion), trente à l’Egypte et douze d’occasion à la Croatie et une commande record de quatre-vingts appareils destinés aux Emirats arabes unis.
(source: lemonde.fr)