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A Madagascar, l’aide internationale conforte un président contesté

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Andry Rajoelina, réélu au cours d’une élection présidentielle boycottée par l’opposition, qui en refuse les résultats, n’a pas hésité à promettre des fonds des bailleurs occidentaux pour s’assurer la victoire.

Le président réélu de Madagascar, Andry Rajoelina, salue la foule à son arrivée à la cérémonie de prestation de serment, à Antananarivo, le 16 décembre 2023. RIJASOLO / AFP

Samedi 16 décembre, Andry Rajoelina a officiellement été investi pour un second mandat de cinq ans à la tête de Madagascar. La cérémonie, organisée avec faste dans le grand stade de Mahamasina, à Antananarivo, parachève un processus électoral contesté, dont celui qui peut, plus que jamais, être qualifié d’« homme fort » de la grande île de l’océan Indien, est sorti victorieux dès le premier tour, avec 58,9 % des voix et un taux de participation de 46 %.

Devant l’instrumentalisation flagrante des institutions chargées de garantir la crédibilité du vote, les failles de la liste des électeurs et le scandale provoqué par la révélation de l’acquisition, en 2014, de la nationalité française par M. Rajoelina, les appels au report du scrutin et à l’ouverture d’un dialogue national lancés par les principaux acteurs de la société malgache, au premier rang desquels les Eglises chrétiennes, sont restés vains. Après avoir dénoncé « un coup d’Etat institutionnel », l’opposition soudée a finalement boycotté l’élection et n’en reconnaît pas les résultats, ce qui laisse entières les interrogations sur la capacité du président à gouverner.

Samedi, la cérémonie d’investiture s’est déroulée sous le contrôle étroit des forces de l’ordre, celles-là mêmes qui, tout au long de la campagne électorale, avaient dispersé les manifestations quasi quotidiennes dont le mot d’ordre était le « retour à l’Etat de droit ».

Réserve diplomatique

Hormis quelques chefs d’Etat africains voisins, les diplomaties occidentales ne se sont pas bousculées pour assister au sacre. Seule la France a dépêché le secrétaire d’Etat chargé de la mer, Hervé Berville. Cette discrétion pourrait être interprétée comme une forme de réserve à l’égard du passage en force auquel s’est livré le président sortant pour assurer sa réélection.

Le 1er décembre, la France, l’Union européenne, le Royaume-Uni, l’Allemagne, le Japon, les Etats-Unis, la Suisse, la Corée du Sud et l’Organisation internationale de la francophonie ont, dans un communiqué commun, pris sobrement « acte de la publication par la Haute Cour constitutionnelle des résultats définitifs de l’élection présidentielle du 16 novembre proclamant vainqueur Andry Rajoelina ». Une formule habile censée ne pas exprimer un quitus, tout en se mettant à l’abri contre d’éventuelles accusations d’ingérence.

Mais est-il possible de prétendre à un statut d’observateur neutre, sinon impuissant, face à la dérive autoritaire du régime lorsque l’aide publique au développement assure près de 70 % des investissements de l’Etat (68 % dans le budget adopté, début décembre, pour 2024) ? Cette perfusion atteint, voire dépasse, 85 % pour l’agriculture, la santé, l’énergie et l’environnement. Elle représente 70 % des investissements réalisés dans l’éducation, les travaux publics, etc.