Soudan
Soudan : l’ONU et l’Union africaine annoncent la fin de leur mission au Darfour
Le retrait de cette force de maintien de la paix qui a duré treize ans intervient malgré une recrudescence des affrontements intercommunautaires dans la région.

La mission de paix conjointe de l’ONU et de l’Union africaine au Darfour (Minuad) doit mettre fin, jeudi 31 décembre, à une opération de treize ans dans cette région de l’ouest du Soudan. Comme l’a précisé la Minuad dans un communiqué, le gouvernement soudanais reprendra alors « la responsabilité de la protection des civils dans la région ». Le retrait progressif des quelque 8 000 membres de la mission onusienne, militaires, policiers et civils, commencera en janvier et doit s’étaler sur une période de six mois.
La fin de la mission, qui avait débuté fin 2007, intervient malgré une recrudescence des affrontements intercommunautaires au Darfour, qui ont provoqué la mort de 15 personnes et des dizaines de blessés la semaine dernière. Les autorités soudanaises ont assuré que leurs troupes seraient déployées dans la région pour contenir les violences. Mais les habitants du Darfour craignent pour leur vie et ont manifesté ces dernières semaines contre le retrait imminent de la force de maintien de la paix.
« La vie des Darfouris est en jeu, et les Nations unies devraient revenir sur leur décision », a déclaré mercredi à l’AFP Mohamed Abdelrahman, un manifestant, lors d’un sit-in au camp de déplacés de Kalma, à Nyala, la capitale du Darfour-Sud. Autour de lui les manifestants arboraient des bannières sur lesquelles on pouvait lire : « Nous faisons confiance à l’ONU pour protéger les personnes déplacées » et « nous rejetons le retrait de la Minuad ».
Date prématurée
La date du 31 décembre avait été jugée prématurée par les membres occidentaux du Conseil de sécurité de l’ONU au nom de la protection des civils. Ils appelaient à un processus graduel et prudent.
Les violences au Darfour avaient débuté en 2003 entre les forces progouvernementales et des insurgés issus de minorités, provoquant la mort d’environ 300 000 personnes et faisant plus de 2,5 millions de déplacés, essentiellement durant les premières années, selon les Nations unies.
Les insurgés accusaient le régime d’Omar Al-Bachir – destitué en avril 2019 sous la pression d’un mouvement de contestation – de marginaliser la région. Pour lutter contre la rébellion, les autorités soudanaises avaient déployé les Janjawid, une milice armée composée essentiellement de nomades arabes, accusés de « nettoyage ethnique » et de viols.
En octobre, le gouvernement de transition soudanais, installé en août 2019 et issu d’un accord entre militaires et dirigeants du mouvement de contestation, a signé un accord de paix avec plusieurs groupes rebelles y compris au Darfour.
Israël et le Soudan ont accepté de normaliser leurs relations – Maison Blanche
Dans ce contexte, Donald Trump va retirer le Soudan de la liste des Etats soutenant le terrorisme, a annoncé la Maison Blanche.
« Le président a annoncé que le Soudan et Israël étaient convenus de normaliser leurs relations, une nouvelle étape majeure vers la paix au Moyen-Orient », a tweeté Judd Deere.
Le Premier ministre soudanais Abdallah Hamdok a aussitôt remercié le président américain dans un tweet.
Donald Trump « a informé le Congrès de son intention d’annuler formellement la désignation du Soudan comme Etat parrain du terrorisme », a indiqué l’exécutif américain, qualifiant ce développement de « moment charnière » pour le Soudan et les relations entre Washington et Khartoum.

Cette annonce intervient après que le Soudan a « accepté de résoudre certaines demandes des victimes américaines du terrorisme et leurs familles. Hier, en application de cet accord, le gouvernement de transition du Soudan a transféré 335 millions de dollars sur un compte séquestre pour ces victimes et leurs familles », a précisé la Maison Blanche.
Il s’agit notamment des attentats perpétrés en 1998 par la nébuleuse jihadiste Al-Qaïda contre les ambassades des Etats-Unis au Kenya et en Tanzanie, et qui avaient fait plus de 200 morts.
Le Soudan, jadis paria de la communauté internationale pour avoir accueilli le chef d’Al-Qaïda Oussama Ben Laden dans les années 1990, a été condamné à verser de telles indemnisations par la justice américaine.
L’accord ouvre la voie à « un nouvel avenir de collaboration et de soutien à la transition historique en cours » au Soudan, selon la Maison Blanche, qui a salué les autorités de transition du pays.
L’exécutif a enfin appelé le Congrès américain à adopter la loi nécessaire pour mettre en œuvre l’accord.
Le Soudan est depuis 1993 sur cette liste noire américaine, synonyme d’entrave aux investissements pour ce pays pauvre.
Les Etats-Unis ont renoué avec Khartoum déjà sous l’ex-président démocrate Barack Obama, lorsque l’ex-président soudanais Omar el-Béchir a commencé à coopérer dans la lutte antiterroriste et joué le jeu de la paix au Sud-Soudan.
La révolution qui a balayé Omar el-Béchir n’a fait qu’accélérer le mouvement.
L’Union africaine suspend le Soudan et exige une autorité civile de transition
L’organisation réclame « l’établissement effectif d’une autorité civile de transition ». « Ceci étant le seul moyen de permettre au Soudan de sortir de la crise actuelle », a annoncé le Conseil de paix et de sécurité de l’UA (PSC).
« Le Conseil imposera automatiquement des mesures punitives sur les individus et les entités qui ont empêché l’établissement d’une autorité civile », a précisé en conférence de presse le Sierra-Léonais Patrick Kapuwa, président en exercice du PSC.
De son côté, le Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed se rendra vendredi au Soudan pour tenter une médiation entre le Conseil militaire de transition (CMT) et l’opposition, a-t-on appris jeudi de source diplomatique à l’ambassade d’Éthiopie à Khartoum. Durant sa visite d’une journée, il rencontrera des délégués du CMT et des opposants membres de la Déclaration des forces de la liberté et du changement (DFCF).
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Soudan : le chef du Conseil militaire de transition démissionne
Le chef du Conseil militaire de transition, qui dirigeait le pays depuis la destitution d’Omar el-Béchir, a démissionné au lendemain de sa nomination. Le général Awad Bin Ouf avait été nommé le 11 avril 2019. Dans un discours à la nation retransmis par la télévision d’État, celui qui n’aura été l’homme fort du Soudan qu’une journée, a donné le nom de son successeur, le général Abdel Fattah al-Burhan Abdelrahmane. Cette annonce intervient alors que de nombreux Soudanais manifestent toujours devant le quartier genéral de l’armée à Khartoum, malgré le couvre-feu. Retour sur les dernières 24 heures.
Omar el-Béchir destitué au Soudan, la fin de 30 ans de règne
L’acteur américain George Clooney, qui milite de longue date contre les crimes de guerre au Darfour, a salué jeudi la chute du président soudanais Omar el-Béchir comme un « premier pas timide vers un vrai changement », mais a appelé à « démanteler » l’ensemble du système.
« Les Soudanais attendaient ce jour depuis longtemps », a-t-il déclaré dans un communiqué avec John Prendergast, avec qui il a fondé l’organisation The Sentry, spécialisée dans l’investigation sur les « criminels de guerre » en Afrique et particulièrement au Darfour soudanais, où un conflit a fait plus de 300 000 morts depuis 2003.
Omar el-Béchir, qui dirigeait le Soudan d’une main de fer depuis 30 ans, a été renversé jeudi par un coup d’État de l’armée, dans le sillage d’un soulèvement populaire, et a été remplacé par un « conseil militaire de transition » pour deux ans.
George Clooney et John Prendergast ont toutefois affirmé que « renverser le dirigeant d’un système violent et corrompu sans démanteler ce système » n’était « pas suffisant ».
« Les prochaines étapes seront cruciales. La communauté internationale doit apporter tout son soutien pour faire en sorte que la transition soit négociée et inclusive, et que le prochain président du Soudan reflète la volonté de son peuple », ont-ils insisté.
Connu pour son engagement politique et humanitaire, George Clooney estime aussi que le président déchu « doit être extradé et jugé » par la Cour pénale internationale pour « génocide et crimes de guerre perpétrés au Darfour ». La juridiction qui siège à La Haye a lancé en 2009 un mandat d’arrêt contre Omar el-Béchir.
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Les Etats-Unis lèvent l’embargo économique de 20 ans contre le Soudan
Washington avait imposé cette mesure en 1997 en raison du soutien présumé du Soudan aux groupes islamistes. Le pays reste malgré tout sur la liste des « sponsors du terrorisme ».
Dans un communiqué, le ministère soudanais des affaires étrangères a salué cette annonce. « Les dirigeants du Soudan, le gouvernement du Soudan et le peuple du Soudan saluent la décision positive prise par le président américain Donald Trump de lever complètement les sanctions économiques. »