Crise économique et aides internationales: le revers des millions du FMI | NewsMada
A nouveau, Madagascar danse sous les millions de dollars. La Covid et la crise économique ont fourni les arguments nécessaires, au FMI, pour accorder un nouveau programme de prêt d’environ 312,4 millions de dollars (soit 219.96 millions de DTS), sur 40 mois, avec un décaissement immédiat de 48,8 millions de dollars. Décision actée au mois d’avril.
Ce plan d’aide suit de près un autre plan d’aide, en 2020, durant la première vague de Covid, d’un montant d’environ 338 millions de dollars.
Mais la différence c’est que le nouveau programme est soumis à des conditions, à la différence de celui accordé en 2020. Le gouvernement de Madagascar s’est engagé, à travers un document appelé “mémorandum”, à remplir un certain nombre de conditions, validées avec le FMI. Faute de les remplir, les autorités malagasy s’exposent à ne pas recevoir les tranches de prêts successives. L’argent doit tomber environ tous les six mois.
Les Nouvelles ont scruté de près ces engagements liant -écrits à la première personne du pluriel par les autorités malagasy- qui doivent relancer le pays. Le FMI prévoit que la croissance atteindra 3,1 % en 2021, après une récession de 4,2% en 2020.
La visée du programme d’aide est exprimée par le FMI dès le début du document. Une visée qui se veut exhaustive : “Le plan vise à reconstituer et à renforcer encore la marge de manœuvre budgétaire pour permettre les investissements et les dépenses sociales indispensables, par la mobilisation des recettes et l’amélioration de la qualité des dépenses ; à reprendre et à faire progresser les réformes structurelles, les efforts de lutte contre la corruption et le programme de gouvernance ; et à renforcer le cadre de la politique monétaire et à soutenir la stabilité financière, tout en maintenant la stabilité des prix et la flexibilité du taux de change.”
Première étape concrète pour le gouvernement : la Loi de finance rectificative 2021 (LFR 2021) qui sera votée durant la session parlementaire actuelle. Ensuite, ces engagements devront se traduire dans un document clé : le très attendu Plan Emergence de Madagascar, qui tarde à venir depuis les 2 ans et demi que Andry Rajoelina a passé au pouvoir.
Secteurs sociaux : santé et éducation
Pour l’exercice budgétaire à venir, Madagascar s’engage à augmenter le budget alloué aux secteurs sociaux, en particulier la santé et l’éducation. Les mêmes conditions qui ont permis de débloquer les précédentes aides financières.
La Loi de finance initiale 2021 donnait un petit coup de pouce à l’éducation. Le budget alloué en 2020 était de 1 306 milliards d’ariary, contre 1 407 milliards, en 2021. L’Etat s’est aussi engagé à augmenter le nombre des enseignants, de 69 354 en 2020 à 77 234 en 2021. Une ambition qui est encore loin de la réalité sur le terrain. Il manque encore de très nombreux enseignants dans les écoles primaires publiques, notamment en brousse. Concernant la santé, l’Etat fait aussi des efforts : en 2020, la Grande Île comptait 10 861 personnels de santé, pour un nombre qui devrait atteindre 13 786 en 2021.
Air Madagascar
En ce qui concerne le secteur aérien, les engagements de l’Etat malagasy allant dans ce sens ne sont ni clairs, ni précis, à part le besoin d’une somme de 55 millions de dollars pour redresser la compagnie nationale. Pour l’heure, la compagnie est clouée au sol, avec un chômage technique qui dure depuis mars 2020. Le business plan pour redresser la compagnie tarde également à venir, alors qu’il était initialement prévu avant la fin de 2020 d’après le ministre des transports, Joël Randriamandranto, au mois d’août 2020.
Jirama
C’est le gouffre financier par excellence. Et le cheval de bataille du FMI qui souhaite la suppression totale, à terme, des transferts d‘argent public vers la Jirama. La compagnie a perdu 400 milliards d’ariary en 2020, soit 155 milliards de plus que sur le business plan de redressement. Et en parallèle, le total des transferts vers la Jirama a atteint 845 milliards d’ariary, soit 1,6% du PIB, chiffre le FMI. Mais le gouvernement s’engage à ne pas dépasser 400 milliards de transfert pour 2021.
Le gouvernement s’engage aussi à ne plus faire comme en 2020, quand il avait ordonné des transferts à la Jirama sans prévenir à l’avance le FMI et la Banque mondiale. En 2020, ce sont ainsi 200 millions de dollars qui ont été virés à la Jirama, pris sur le montant des aides Covid. Un nouveau plan de relance de la société, un enième, doit être mis au point…
Carburant
Les autorités se sont engagées à mettre en place un mécanisme d’ajustement des prix à la pompe, versus un prix fixe comme ce qui existe aujourd’hui. L’engagement figurait déjà dans le précédent programme de prêt du FMI mais n’a jamais été mis en œuvre. Ce qui n’a jamais bloqué le décaissement de l’argent.
Transparence et lutte contre la corruption
Le gouvernement prend aussi des engagements clairs sur la transparence et la lutte contre la corruption. Il promet notamment de faire la lumière sur la destination des aides covid, et compléter la page récapitulative sur le site du ministère des finances, qui est déjà très bien alimentée. Le gouvernement promet aussi d’adopter un budget, avant fin juin 2021, pour l’agence de recouvrement des avoirs illicites.
L’or dans l’air
Le gouvernement promet de mettre en place une réserve d’or, au sein de la Banque centrale, d’une tonne maximum avant la fin de 2021. La réserve doit servir à stabiliser l’ariary et à assurer des entrées en devise quand les exportations du métal seront autorisées. La Banque centrale devrait aussi mettre en place un processus de raffinage de l’or.
newsmada: Tiana Ramanoelina et Emre Sari
