Moscou et Pékin, qui n’ont pas condamné l’attaque iranienne sur le territoire israélien, voient dans cette crise l’occasion d’enfoncer un coin entre l’Occident et le reste du monde.
Vladimir Poutine participe à une réunion à Moscou, Russie, le 10 avril 2024. SPUTNIK/GAVRIIL GRIGOROV/KREMLIN VIA REUTERS
Derrière les appels à la retenue, lancés à l’unisson par la plupart des capitales, les diplomaties russe et chinoise ont résolument pris le parti de l’Iran, dans la crise qui oppose ce pays à Israël. Ni Moscou ni Pékin n’ont condamné l’attaque aérienne massive menée par Téhéran dans la nuit du samedi 13 au dimanche 14 avril. Au contraire, lors d’un entretien téléphonique, lundi, entre le ministre des affaires étrangères chinois, Wang Yi, et son homologue iranien, Hossein Amir Abdollahian, le premier a rappelé que « la Chine condamne vigoureusement et s’oppose fermement à l’attaque sur la section consulaire de l’ambassade d’Iran à Damas [le 1er avril] », selon le compte rendu de cet entretien publié par l’agence de presse officielle Chine nouvelle.
En revanche, Pékin « prend note de la déclaration de l’Iran selon laquelle l’action entreprise était limitée et constituait un acte d’autodéfense ». Au cours d’un appel, mardi, avec son homologue iranien, Ebrahim Raïssi, Vladimir Poutine a, lui aussi, noté la volonté de l’Iran « d’éviter une escalade supplémentaire ».
Le représentant permanent de la Russie auprès des Nations unies, Vassilyi Nebenzia, avait déjà évoqué, la veille, une « réponse légitime » de la part de l’Iran et préférait insister sur « l’hypocrisie » occidentale dans le dossier. « Simona, rappelez-moi quand Israël a condamné les frappes du régime de Kiev sur le territoire russe », lançait, de son côté, la porte-parole de la diplomatie russe, Maria Zakharova, à l’ambassadrice israélienne à Moscou, Simona Galperin.
Le souverain pontife est en visite dans ce pays d’Asie centrale pour un congrès interreligieux. Une rencontre un temps envisagée avec le patriarche de Moscou, Kirill, n’aura pas lieu.
Le palais de l’Indépendance, à Noursoultan (Kazakhstan), le 12 septembre 2022. PAVEL MIKHEYEV / REUTERS
A Noursoultan, la capitale du Kazakhstan, où il se rend du 13 au 15 septembre, le pape François espérait initialement rencontrer Kirill, le patriarche de Moscou, pour, à travers lui, obtenir une invitation de Vladimir Poutine à venir en Russie. Mais Kirill ne viendra pas, et c’est finalement Xi Jinping qui se trouvera en même temps que le pontife dans l’ancienne Astana, mercredi 14 septembre.
Aucune rencontre entre le président chinois et le chef de l’Eglise catholique n’est inscrite à l’agenda officiel. Mais l’absence de Kirill et la présence de Xi font se croiser les deux questions diplomatiques qui valent à François les critiques les plus véhémentes à l’intérieur comme à l’extérieur de son Eglise, à savoir ses déclarations controversées sur la guerre en Ukraine et l’accord conclu, en 2018, par le Saint-Siège avec Pékin sur la nomination des évêques chinois. Face aux dirigeants russe et chinois, François ferait preuve, selon ses détracteurs, d’une naïveté complaisante.
François se rend dans cet immense pays d’Asie centrale, ancien territoire soviétique émancipé en 1991, à l’occasion du VIIe congrès des dirigeants des religions mondiales et traditionnelles, auquel il participera comme à un « pèlerinage de paix », a-t-il précisé dimanche après l’angélus. Le premier congrès a eu lieu en 2003, à l’initiative de l’ancien président kazakh (qui a démissionné en 2019) Noursoultan Nazarbaïev, soucieux de stabilité religieuse dans la région, après les attentats du 11-Septembre. Mais c’est la première fois qu’un pape s’y rend. Lors des précédents congrès, la délégation du Vatican était conduite par un cardinal.
Une déconvenue
Cette édition a pour thème le rôle des dirigeants religieux dans la période postpandémique. Parmi une centaine de délégations musulmanes, chrétiennes, juives, bouddhistes, hindouistes ou shintoïstes, François retrouvera Ahmed Al-Tayeb, le grand imam de la mosquée d’Al-Azhar, au Caire, dont il a fait son interlocuteur privilégié dans l’islam sunnite. En revanche, celui qui avait motivé sa venue, Kirill, sera absent : le patriarcat de Moscou a fait savoir, sans avancer de raison, le 24 août, qu’il ne se rendrait finalement pas à Noursoultan.
Pour le pape, c’est une déconvenue. Depuis l’invasion de l’Ukraine, le 24 février, François s’est efforcé par tous les moyens de s’entretenir avec Vladimir Poutine pour offrir ses bons offices et parvenir à arrêter la guerre. Il espère atteindre le président russe par l’intermédiaire du patriarche. Les deux dignitaires religieux s’étaient rencontrés à Cuba en 2016, une première historique. Mais c’est la seconde fois qu’échoue le projet d’un nouveau tête-à-tête. Un rendez-vous à Jérusalem, en juin, n’a finalement pas eu lieu. Le patriarche, qui soutient avec zèle la guerre déclenchée par Moscou, avait peu apprécié de se voir qualifier par François de « clerc d’Etat » et « d’enfant de chœur de Poutine ».
Longtemps considéré comme un libéral, l’ex-premier ministre et doublure de Vladimir Poutine au Kremlin se pose aujourd’hui en faucon du régime et réclame le rétablissement de la peine de mort.
Le numéro deux du Conseil de sécurité russe, Dmitri Medvedev, à Moscou, le 27 janvier 2022. YULIA ZYRYANOVA / AFP
« Je les déteste. Ce sont des bâtards et des dégénérés. Ils veulent la mort pour nous, pour la Russie. Et tant que je vivrai, je ferai tout pour les faire disparaître. » Lapidaire, le dernier message de Dmitri Medvedev sur le réseau social Telegram, mardi 7 juin, a le mérite de la clarté, même si un doute subsiste quant à ce « ils » à qui l’ancien président russe voue une haine si farouche. Les Ukrainiens ? Peu probable, le discours public russe persistant à présenter le pays voisin comme ami victime, en quelque sorte, d’un malentendu. Les Occidentaux ? Plus sûrement, tant ce discours est devenu une constante chez l’actuel numéro deux du Conseil de sécurité russe, dont la virulence est proportionnelle à l’image de « libéral » qu’il traînait jusque-là.
Le fil Telegram de M. Medvedev, ouvert seulement en mars (pendant des années, les autorités russes ont tenté de bloquer le service de messagerie avant de renoncer), est plein de ces saillies contre l’Occident « odieux, criminel et immoral » et de mises en garde : « La Russie a assez de puissance pour remettre à sa place tous ces ennemis déchaînés contre notre pays. » Ses références à une confrontation nucléaire sont fréquentes et le responsable du Conseil de sécurité, institution qui a pris de l’importance à la faveur du conflit en Ukraine, demande aussi le rétablissement de la peine de mort.
Etonnant parcours pour un homme qui, parce qu’il était féru de rock et adepte des nouvelles technologies, fut longtemps perçu comme un « pro-occidental » et un libéral. Son passage au Kremlin, entre 2008 et 2012, sera marqué par des promesses – non tenues – d’ouverture politique et de libéralisation économique. Eternelle doublure de Vladimir Poutine, promu président du parti au pouvoir Russie unie depuis 2012, il était ensuite rentré dans le rang et avait récupéré son fauteuil de premier ministre, jusqu’à 2020.
Sa transformation en faucon n’est pas entièrement nouvelle. En octobre 2021, il avait publié un article remarqué, reprenant au mot près les thèses de son mentor sur l’Ukraine pour appeler à « cesser les contacts » avec les dirigeants de ce pays. Il mentionnait notamment « certaines racines ethniques » (juive) …
Lors d’une réunion des dirigeants des Etats membres de l’Organisation du traité de sécurité collective au Kremlin, à Moscou, le 16 mai 2022. ALEXANDER NEMENOV / AP
Ni soutien ni condamnation : telle est la position adoptée par les cinq pays d’Asie centrale (Kazakhstan, Ouzbékistan, Tadjikistan, Kirghizistan et Turkménistan) à l’égard de l’ancien suzerain russe et de la guerre qu’il mène en Ukraine. Fin mai, les services de sécurité du Kirghizistan (GKNB) ont porté plainte contre un ressortissant kirghiz combattant dans les rangs des forces ukrainiennes. Le mois précédent, ces mêmes services avaient averti leurs citoyens de s’abstenir d’exhiber la lettre Z, symbole de l’offensive russe, sous peine de poursuites judiciaires.
Aucun chef d’Etat des cinq pays d’Asie centrale ne s’est affiché, cette année, aux côtés de Vladimir Poutine, lors du défilé du 9 mai, sur la place Rouge, célébrant la victoire sur le nazisme. Le Kazakhstan est allé jusqu’à annuler la parade militaire à domicile, pour la première fois depuis l’indépendance, en 1991.
A la place du traditionnel pèlerinage à Moscou, le président kazakh, Kassym-Jomart Tokaïev, s’est rendu en Turquie pour signer des accords de coopération militaire (dont la construction d’une usine de drones d’attaque ANKA au Kazakhstan) et de développement de corridors logistiques (marchandises et hydrocarbures) contournant le territoire russe. Ce geste a ulcéré en Russie, inspirant une série de déclarations agressives, comme un appel à « dénazifier le Kazakhstan » venant d’un député du Parlement de Moscou.
Au-delà des symboles, les chancelleries d’Asie centrale ont toutes refusé de suivre Moscou dans sa reconnaissance, aux dépens de la souveraineté territoriale de l’Ukraine, de l’indépendance des deux républiques autoproclamées de Donetsk et de Louhansk.
« Les pays d’Asie centrale entretiennent de bonnes relations avec l’Ukraine. Ils sont peinés par ce qui se passe », note Michaël Levystone, chercheur à l’Institut français des relations internationales (IFRI) et spécialiste de cette région. Les deux régimes les plus autoritaires, le Tadjikistan et le Turkménistan, maintiennent une chape de plomb sur le sujet.
En revanche, le Kirghizistan s’est montré défiant envers Moscou,
La guerre en Ukraine n’a cessé depuis l’ouverture des hostilités de créer des dissensions au sein des Églises orthodoxes. L’indépendance de l’Église orthodoxe ukrainienne du Patriarcat de Moscou à laquelle elle était rattachée en est le dernier épisode.
Laure des Grottes de Kiev
Dès le début de l’invasion russe de l’Ukraine, les autorités orthodoxes ukrainiennes relevant du Patriarcat de Moscou avaient exprimé leur opposition au conflit et avaient pris leurs distances du patriarche Kirill, qui n’a caché son soutien à la politique du gouvernement russe. La guerre se poursuivant, les dissensions entre les sièges de Kiev et de Moscou sont allées croissantes. Vendredi 27 mai, l’assemblée clérico-laïque de l’Église orthodoxe ukrainienne, convoquée dans la capitale, a déclaré «sa pleine indépendance» du Patriarcat de Moscou. «Nous ne sommes pas d’accord avec le patriarche moscovite Kirill (…) en ce qui concerne la guerre en Ukraine», a expliqué dans un communiqué l’Église orthodoxe ukrainienne. «Le concile condamne la guerre, qui est une violation du commandement de Dieu, Tu ne tueras point, et exprime ses condoléances à tous ceux qui souffrent à cause de la guerre», ajoute le texte.
Selon le communiqué, les relations avec le Patriarcat étaient «compliquées ou inexistantes» depuis la déclaration de la loi martiale en Ukraine. L’Église ukrainienne précise rejeter totalement la position du patriarche Kirill à propos de la guerre. «Non seulement il n’a pas condamné l’agression militaire de la Russie, mais il n’a pas non plus trouvé de mots pour le peuple ukrainien qui souffre», a déclaré le porte-parole de l’Église.
Le président français est le premier chef d’État occidental à avoir rencontré son homologue russe (ici, lundi, au Kremlin) depuis le début de la crise ukrainienne. SPUTNIK/via REUTERS
Lundi soir à Moscou, le chef de l’État a proposé des «voies de convergence» au président russe.
Ils se sont vus pendant plus de cinq heures, éloignés de plusieurs mètres, chacun à un bout d’une immense table blanche et ovale. Mais cette distance imposée par le président russe n’avait pas forcément de signification politique. Vladimir Poutine, qui redoute le Covid et avait exigé de la délégation française quatre tests PCR négatifs pour pouvoir venir en Russie, avait réservé le même sort, la semaine dernière, à son ami Viktor Orban, le premier ministre hongrois.
Emmanuel Macron est un président qui aime prendre des risques. Et qui ne renonce jamais devant l’obstacle, même quand il est jugé infranchissable pour le plus agile des chevaux de course. Il est donc allé à Moscou pour rencontrer l’ours du Kremlin, qui depuis l’automne dernier met l’Europe en tension en massant plus de 100.000 hommes aux frontières de l’Ukraine, ancienne république soviétique dont il ne digère pas l’indépendance. C’était la première négociation directe entre le président russe et un dirigeant occidental de premier plan depuis la montée des tensions en décembre. Sur les terres de Vladimir Poutine, dans ce Kremlin si chargé d’histoire, de secrets et de coups tordus, cette septième rencontre avec le président russe, qui s’ajoute à seize coups de téléphone, sera peut-être la plus importante. Pour l’avenir de l’Ukraine. Pour la sécurité de l’Europe. Et pour le bilan international du président, à quelques semaines de la présidentielle.
L’initiative d’Emmanuel Macron visait à amorcer une «désescalade» en proposant une porte de sortie à Vladimir Poutine. Le président français a proposé à son homologue russe de «construire une réponse utile collectivement». Une réponse qui permette «d’éviter la guerre et de construire des éléments de stabilité, de visibilité pour tout le monde». Le président russe a salué les efforts de la France pour résoudre la crise. «Tu es un interlocuteur de qualité», a-t-il dit à Emmanuel Macron.
La première rencontre entre les deux dirigeants est considérée comme essentielle afin de maintenir de bonnes relations russo-israéliennes après le départ de Netanyahu.
Le président russe Vladimir Poutine, à gauche, et le Premier ministre Naftali Bennett lors de leur réunion à Sotchi, en Russie, le 22 octobre 2021. (Crédit : Evgeny Biyatov, Spoutnik, Kremlin Pool Photo via AP)
La première rencontre entre le Premier ministre israélien Naftali Bennett et le président russe Vladimir Poutine a duré environ cinq heures vendredi, obligeant le dirigeant israélien à prolonger sa visite à Sotchi jusqu’après Shabbat, a annoncé son bureau.
« La réunion a été chaleureuse et positive et a traité d’une série de questions d’importance pour les deux nations », a rapporté un communiqué du bureau de Bennett après que les deux dirigeants se sont rencontrés dans la station balnéaire de la mer Noire pour ces premiers entretiens en face à face depuis que Bennett a pris ses fonctions plus tôt cette année.
Le communiqué indique que la réunion officielle à la résidence de Poutine a duré environ cinq heures, ce après quoi les deux dirigeants « sont sortis pour échanger sur le balcon de la résidence, avant de parcourir les allées du domaine en direction de la mer ».
Les représentations russes n’ont pas encore commenté la rencontre.
Bennett avait initialement prévu de retourner en Israël vers 13h, après sa réunion à 10h, mais les longues discussions ont contraint Bennett et son entourage à rester à Sotchi jusqu’à samedi soir pour éviter de voyager le jour du Shabbat.
Le communiqué semblait tenter de souligner que les deux responsables ont développé des liens personnels. L’ancien Premier ministre Benjamin Netanyahu a longtemps soutenu que seuls ses liens personnels étroits avec Poutine pouvaient maintenir des relations israélo-russes étroites, et un responsable russe avait précédemment indiqué qu’il faudrait du temps au dirigeant russe pour établir la même relation avec Bennett.
Au début de la réunion à Sotchi, Poutine a déclaré à Bennett qu’ils avaient « de nombreuses questions problématiques » à discuter, mais qu’il y avait aussi de nombreux « points de contact et opportunités de coopération, notamment en matière de lutte contre le terrorisme ».
Le président russe a également déclaré à Bennett – qui est devenu Premier ministre en juin, évinçant Netanyahu après 12 ans de pouvoir – qu’il espérait et s’attendait à ce que les relations israélo-russes se poursuivent sans heurts.
« J’espère vraiment que, malgré les batailles politiques internes, qui sont inévitables dans chaque pays, votre gouvernement poursuivra une politique de continuité dans les relations russo-israéliennes », a déclaré Poutine, soulignant ses liens étroits avec le précédent gouvernement israélien.
Bennett a noté que les deux hommes allaient « discuter de la situation en Syrie ainsi que des efforts pour arrêter le programme nucléaire de l’Iran ». Le Premier ministre a ajouté que les pourparlers entre les deux nations « seront basés sur le lien profond entre les deux pays » et qu’il considérait le président russe « comme un véritable ami du peuple juif ».
Environ un million de russophones vivent en Israël, et Poutine a par le passé qualifié le pays d’avant-poste russe.
Bennett a déclaré à Poutine qu’il s’attendait à « discuter de toute une série de problèmes actuels, afin de renforcer les liens entre les pays dans les domaines économique, technologique, scientifique et culturel ».
Le Premier ministre a également informé le président russe des efforts déployés visant à construire un musée en Israël commémorant les soldats juifs qui ont combattu dans diverses armées pendant la Seconde Guerre mondiale, y compris dans l’Armée rouge russe.
Le Premier ministre Naftali Bennett, à gauche, rencontre le président russe Vladimir Poutine à Sotchi, en Russie, le 22 octobre 2021. (Crédit : Kobi Gideon/GPO)
Strasbourg, 24 juin 2019 (AFP) – L’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE) a voté dans la nuit de lundi à mardi un texte rendant possible le retour de la Russie dans cette instance, ce qui devrait mettre un terme à cinq ans de crise institutionnelle avec Moscou.
Au terme de quatre heures de débat houleux, suivies de presque cinq heures de vote sur des amendements, 118 parlementaires des Etats membres du Conseil de l’Europe ont finalement accepté, au grand dam de l’Ukraine, que la Russie puisse dès mardi présenter une délégation.
Ce vote devrait permettre à la Russie de participer mercredi à l’élection du secrétaire général de l’organisation paneuropéenne de défense des droits de l’Homme. Quelque 62 parlementaires ont voté contre le texte et dix se sont abstenus. Lire la suite »